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Précisions sur l’exonération de TFPB applicable aux bâtiments affectés à un usage agricole

Affaires - Fiscalité des entreprises
13/12/2023
Dans un arrêt du 4 décembre 2023, le Conseil d’État précise que, compte tenu de la proportion importante de vin acquis par une SCA auprès de producteurs non adhérents, l’activité de cette société ne peut être regardée comme constituant le prolongement d’opérations qui s’insèrent dans le cycle biologique de la production animale ou végétale, au sens du a du 6° de l’article 1382 du CGI. Par suite, les immeubles lui appartenant ne pouvant être considérés comme affectés à un usage agricole au sens de ces mêmes dispositions, la société ne peut bénéficier de l’exonération de TFPB prévue au b du 6° de ce même article.
Pour mémoire, le 6° de l’article 1382 du CGI prévoit que sont exonérés de TFPB :
  • a. les bâtiments qui servent aux exploitations rurales tels que les granges, écuries, caves et pressoirs qui sont destinés « soit à loger les bestiaux des fermes et métairies ainsi que le gardien de ces bestiaux, soit à serrer les récoltes » ; et
  • b. dans les mêmes conditions, les bâtiments affectés à un usage agricole par les sociétés coopératives agricoles, ainsi que les unions de sociétés coopératives agricoles ou unions de coopératives agricoles et de coopératives de consommation constituées et fonctionnant conformément aux dispositions légales qui les régissent.
En l’espèce, une société coopérative agricole (SCA) qui réalise, pour les besoins exclusifs de ses adhérents, une activité d'assemblage, d'embouteillage, de conditionnement et de commercialisation de vin a fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle l’administration fiscale a remis en cause l’exonération de TFPB dont elle bénéficiait.

La SCA a saisi le tribunal administratif de Montpellier afin de demander la décharge des cotisations supplémentaires de TFPB auxquelles elle a été assujettie au titre des années en litige.

Le tribunal administratif de Montpellier a toutefois rejeté sa demande et jugé que les locaux dans lesquels elle exerce son activité ne pouvaient être regardés comme affectés à un usage agricole.

En effet, après avoir relevé que, bien qu’importants, les moyens techniques mis en œuvre par la SCA au titre de son activité n’excédaient pas les besoins collectifs de ses adhérents, le tribunal s’est fondé sur ce que ses achats de vin auprès de producteurs non adhérents en vue de les assembler avec les vins de ses adhérents, préalablement à leur conditionnement et leur commercialisation, représentaient plus de 30 % de ses achats, au cours des années en litige.

Dans une décision du 4 décembre 2023, le Conseil d’État précise d’une part, que l’exonération de TFPB prévue au a du 6° de l’article 1382 du CGI s’applique « aux bâtiments affectés à un usage agricole, c’est-à-dire à la réalisation d'opérations qui s'insèrent dans le cycle biologique de la production animale ou végétale ou qui constituent le prolongement de telles opérations ». Or, selon le Conseil d’État, l’activité de transformation ou d’assemblage par un producteur, outre son propre raisin ou vin, du raisin ou du vin acheté à des viticulteurs tiers dans une proportion importante ne peuvent être regardés comme constituant le prolongement de telles opérations.

Il précise d’autre part, que les dispositions du b du 6° de l’article précité, qui font expressément référence aux conditions de l'exonération de taxe foncière prévue au a, « ont entendu donner à la notion d'usage agricole qu'elles mentionnent une signification visant les opérations qui sont réalisées habituellement par les agriculteurs eux-mêmes et qui ne présentent pas un caractère industriel ». Il indique à cet égard que ne présentent pas un caractère industriel, les opérations réalisées par une SCA « avec des moyens techniques qui n'excèdent pas les besoins collectifs de ses adhérents, quelle que soit l'importance de ces moyens ».

Par suite, selon le Conseil d’État, compte tenu de la proportion importante de vin acheté par la SCA auprès de producteurs non adhérents, et quand bien même ces achats auraient été nécessaires pour améliorer la qualité des vins produits par ses adhérents, son activité ne peut être regardée comme constituant le prolongement d'opérations qui s'insèrent dans le cycle biologique de la production animale ou végétale, au sens du a du 6° de l'article 1382 du CGI.

Les immeubles appartenant à la SCA ne peuvent donc être considérés comme affectés à un usage agricole au sens de ces mêmes dispositions et la SCA ne peut en conséquence bénéficier de l'exonération prévue au b du 6° du même article.

Selon le Conseil d’État, le tribunal administratif n’a donc pas commis d’erreur de droit ni donné aux faits de l’espèce une inexacte qualification juridique.
Source : Actualités du droit